La forme de circulation par laquelle largent se métamorphose en capital contredit toutes les lois développées jusquici sur la nature de la marchandise, de la valeur, de largent et de la circulation elle-même. Ce qui distingue la circulation du capital de la circulation simple, cest lordre de succession inverse des deux mêmes phases opposées, vente et achat. Comment cette différence purement formelle pourrait-elle opérer dans la nature même de ces phénomènes un changement aussi magique ?
Ce nest pas tout. Linversion des phases complémentaires nexiste que pour un seul des trois « amis du commerce » qui trafiquent ensemble. Comme capitaliste, jachète de A une marchandise que je vends à B, tandis que, comme simple échangiste, je vends de la marchandise à B et en achète de A. A et B ny font pas de distinction, ils fonctionnent seulement comme acheteurs ou vendeurs. En face deux, je suis moi-même ou simple possesseur dargent ou simple possesseur de marchandise, et, à vrai dire, dans les deux séries de transactions, je fais toujours face à une personne comme acheteur, à une autre comme vendeur, au premier comme argent, au second comme marchandise. Pour aucun deux je ne suis ni capital, ni capitaliste, ni représentant de nimporte quoi de supérieur à la marchandise ou à largent. A mon point de vue, mon achat de A et ma vente à B constituent une série, mais lenchaînement de ces termes nexiste que pour moi. A ne sinquiète point de ma transaction avec B, ni B de ma transaction avec A. Si jentreprenais de leur démontrer le mérite particulier que je me suis acquis par le renversement de lordre des termes, ils me prouveraient quen cela même je suis dans lerreur, que la transaction totale na pas commencé par un achat et fini par une vente, mais tout au contraire. En réalité, mon premier acte, lachat, était, au point de vue de A, une vente, et mon second acte, la vente, était, au point de vue de B, un achat. Non contents de cela, A et B finiront par déclarer que lensemble de la transaction na été quune simagrée, et désormais le premier vendra directement au second, et le second achètera directement du premier. Tout se réduit alors à un seul acte de circulation ordinaire, simple vente du point de vue de A et simple achat du point de vue de B. Le renversement de lordre de succession de ses phases ne nous a donc pas fait dépasser la sphère de la circulation des marchandises, et il nous reste forcément à examiner si, par sa nature, elle permet un accroissement des valeurs qui y entrent, cest-à-dire la formation dune plus-value.
Prenons le phénomène de la circulation dans une forme sous laquelle il se présente comme simple échange de marchandises. Cela arrive toutes les fois que deux producteurs-échangistes achètent lun de lautre et que leurs créances réciproques sannulent au jour de léchéance. Largent ny entre quidéalement comme monnaie de compte pour exprimer les valeurs des marchandises par leurs prix. Dès quil sagit de la valeur dusage, il est clair que nos échangistes peuvent gagner tous les deux. Tous deux aliènent des produits qui ne leur sont daucune utilité et en acquièrent dautres dont ils ont besoin. De plus, A qui vend du vin et achète du blé produit peut-être plus de vin que nen pourrait produire B dans le même temps de travail, et B dans le même temps de travail plus de blé que nen pourrait produire A. Le premier obtient ainsi pour la même valeur déchange plus de blé et le second plus de vin que si chacun des deux, sans échange, était obligé de produire pour lui-même les deux objets de consommation. Sil est question de la valeur dusage, on est donc fondé à dire que « léchange est une transaction dans laquelle on gagne des deux côtés 1 ». Il nen est plus de même pour la valeur déchange. « Un homme qui possède beaucoup de vin et point de blé commerce avec un autre homme qui a beaucoup de blé et point de vin: entre eux se fait un échange dune valeur de 50 en blé, contre une valeur de 50 en vin. Cet échange nest accroissement de richesses ni pour lun ni pour lautre car chacun deux avant léchange, possédait une valeur égale à celle quil sest procurée, par ce moyen 2.» Que largent, comme instrument de circulation, serve dintermédiaire entre les marchandises, et que les actes de la vente et de lachat soient ainsi séparés, cela ne change pas la question 3. La valeur est exprimée dans les prix des marchandises avant quelles entrent dans la circulation, au lieu den résulter 4.
Si lon fait abstraction des circonstances accidentelles qui ne proviennent point des lois immanentes à la circulation, il ne sy passe, en dehors du remplacement dun produit utile par un autre, rien autre chose quune métamorphose ou un simple changement de forme de la marchandise. La même valeur, cest-à-dire le même quantum de travail social réalisé, reste toujours dans la main du même échangiste, quoiquil la tienne tour à tour sous la forme de son propre produit, de largent et du produit dautrui. Ce changement de forme nentraîne aucun changement de la quantité de valeur. Le seul changement quéprouve la valeur de la marchandise se borne à un changement de sa forme argent. Elle se présente dabord comme prix de la marchandise offerte à la vente, puis comme la même somme dargent exprimée dans ce prix, enfin comme prix dune marchandise équivalente. Ce changement de forme naffecte pas plus la quantité de valeur que le ferait le change dun billet de cent francs contre quatre louis et quatre pièces de cent sous. Or, comme la circulation, par rapport à la valeur des marchandises, nimplique quun changement de forme, il nen peut résulter quun échange déquivalents. Cest pourquoi même léconomie vulgaire, toutes les fois quelle veut étudier le phénomène dans son intégrité, suppose toujours que loffre et la demande séquilibrent, cest-à-dire que leur effet sur la valeur est nul. Si donc, par rapport à la valeur dusage, les deux échangistes peuvent gagner, ils ne peuvent pas gagner tous deux par rapport à la valeur déchange. Ici sapplique, au contraire, le dicton : « Là où il y a égalité, il ny a pas de lucre 5. » Des marchandises peuvent bien être vendues à des prix qui sécartent de leurs valeurs; mais Cet écart apparaît comme une infraction de la loi de léchange 6. Dans sa forme normale, léchange des marchandises est un échange déquivalents, et ne peut être par conséquent un moyen de bénéficier 7.
Les tentatives faites pour démontrer que la circulation des marchandises est source de plus-value trahissent presque toujours chez leurs auteurs un quiproquo, une confusion entre la valeur dusage et la valeur déchange, témoin Condillac : « Il est faux, dit cet écrivain, que, dans les échanges, on donne valeur égale pour valeur égale. Au contraire, chacun des contractants en donne toujours une moindre pour une plus grande ... En effet, si on échangeait toujours valeur égale pour valeur égale, il ny aurait de gain à faire pour aucun des contractants. Or, tous les deux en font, ou en devraient faire. Pourquoi ? Cest que les choses nayant quune valeur relative à nos besoins, ce qui est plus pour lun est moins pour lautre, et réciproquement ... Ce ne sont pas les choses nécessaires à notre consommation que nous sommes censés mettre en vente : cest notre surabondant ... Nous voulons livrer une chose qui nous est inutile, pour nous en procurer une qui nous est nécessaire 8. » Il fut « naturel de juger quon donnait, dans les échanges, valeur égale pour valeur égale, toutes les fois que les choses quon échangeait étaient estimées égales en valeur chacune à une même quantité dargent ... il y a encore une considération qui doit entrer dans le calcul ; cest de savoir si nous échangeons tous deux un surabondant pour une chose nécessaire ». Non seulement Condillac confond lune avec lautre, valeur dusage et valeur déchange, mais encore il suppose avec une simplicité enfantine, que, dans une société fondée sur la production marchande, le producteur doit produire ses propres moyens de subsistance, et ne jeter dans la circulation que ce qui dépasse ses besoins personnels, le superflu 9. On trouve néanmoins largument de Condillac souvent reproduit par des économistes modernes, quand ils essayent de prouver que la forme développée de léchange, cest-à-dire le commerce, est une source de plus-value. « Le commerce, est-il dit, par exemple, ajoute de la valeur aux produits, car ces derniers ont plus de valeur dans les mains du consommateur que dans celles du producteur, on doit donc le considérer rigoureusement (strictly) comme un acte de production 10. » Mais on ne paye pas les marchandises deux fois, une fois leur valeur dusage et lautre fois leur valeur déchange. Et si la valeur dusage de la marchandise est plus utile à lacheteur quau vendeur, sa forme argent est plus utile au vendeur quà lacheteur. Sans cela la vendrait-il ? On pourrait donc dire tout aussi bien que lacheteur accomplit rigoureusement un acte de production, quand il transforme par exemple les chaussettes du bonnetier en monnaie.
Tant que des marchandises, ou des marchandises et de largent de valeur égale, cest-à-dire des équivalents, sont échangés, il est évident que personne ne tire de la circulation plus de valeur quil y en met. Alors aucune formation de plus-value ne peut avoir lieu. Mais quoique la circulation sous sa forme pure nadmette déchange quentre équivalents, on sait bien que dans la réalité les choses se passent rien moins que purement. Supposons donc quil y ait échange entre non-équivalents.
Dans tous les cas, il ny a sur le marché quéchangiste en face déchangiste, et la puissance quexercent ces personnages les uns sur les autres nest que la puissance de leurs marchandises. La différence matérielle qui existe entre ces dernières est le motif matériel de léchange et place les échangistes en un rapport de dépendance réciproque les uns avec les autres, en ce sens quaucun deux na entre les mains lobjet dont il a besoin et que chacun deux possède lobjet des besoins dautrui. A part cette différence entre leurs utilités, il nen existe plus quune autre entre les marchandises, la différence entre leur forme naturelle et leur forme valeur, largent. De même les échangistes ne se distinguent entre eux quà ce seul point de vue : les uns sont vendeurs, possesseurs de marchandises, les autres acheteurs, possesseurs dargent.
Admettons maintenant que, par on ne sait quel privilège mystérieux, il soit donné au vendeur de vendre sa marchandise au-dessus de sa valeur, 110 par exemple quand elle ne vaut que 100, cest-à-dire avec un enchérissement de 10 %. Le vendeur encaisse donc une plus-value de 10. Mais après avoir été vendeur, il devient acheteur. Un troisième échangiste se présente à lui comme vendeur et jouit à son tour du privilège de vendre la marchandise 10 % trop cher. Notre homme a donc gagné 10 dun côté pour perdre 10 de lautre 11. Le résultat définitif est en réalité que tous les échangistes se vendent réciproquement leurs marchandises 10 % au-dessus de leur valeur ce qui est la même chose que sils les vendaient à leur valeur réelle. Une semblable hausse générale des prix produit le même effet que si les valeurs des marchandises, au lieu dêtre estimées en or, létaient, par exemple, en argent. Leurs noms monétaires cest-à-dire leurs prix nominaux sélèveraient, mais leurs rapports de valeur resteraient les mêmes.
Supposons, au contraire, que ce soit le privilège de lacheteur de payer les marchandises au-dessous de leur valeur. Il nest pas même nécessaire ici de rappeler que lacheteur redevient vendeur. Il était vendeur avant de devenir acheteur. Il a perdu déjà 10 % dans sa vente : quil gagne 10 % dans son achat et tout reste dans le même état 12.
La formation dune plus-value et, conséquemment, la transformation de largent en capital ne peuvent donc provenir ni de ce que les vendeurs vendent les marchandises au-dessus de ce quelles valent, ni de ce que les acheteurs les achètent au-dessous 13.
Le problème nest pas le moins du monde simplifié quand on y introduit des considérations étrangères, quand on dit, par exemple, avec Torrens : « La demande effective consiste dans le pouvoir et dans linclination [!] des consommateurs, que léchange soit immédiat ou ait lieu par un intermédiaire, à donner pour les marchandises une certaine portion de tout ce qui compose le capital plus grande que ce que coûte leur production 14 ». Producteurs et consommateurs ne se présentent les uns aux autres dans la circulation que comme vendeurs et acheteurs. Soutenir que la plus-value résulte, pour les producteurs, de ce que les consommateurs payent les marchandises plus cher quelles ne valent, cest vouloir déguiser cette proposition : les échangistes ont, en tant que vendeurs, le privilège de vendre trop cher. Le vendeur a produit lui-même la marchandise ou il en représente le producteur; mais lacheteur, lui aussi, a produit la marchandise convertie en argent, ou il tient la place de son producteur. Il y a donc aux deux pôles des producteurs ; ce qui les distingue, cest que lun achète et que lautre vend. Que le possesseur de marchandises, sous le nom de producteur, vende les marchandises plus quelles valent, et que, sous le nom de consommateur, il les paye trop cher, cela ne fait pas faire un pas à la question 15.
Les défenseurs conséquents de cette illusion, à savoir que la plus-value provient dune surélévation nominale des prix, ou du privilège quaurait le vendeur de vendre trop cher sa marchandise, sont donc forcés dadmettre une classe qui achète toujours et ne vend jamais, ou qui consomme sans produire. Au point de vue où nous sommes arrivés, celui de la circulation simple, lexistence dune pareille classe est encore inexplicable. Mais anticipons! Largent avec lequel une telle classe achète constamment doit constamment revenir du coffre des producteurs dans le sien, gratis, sans échange, de gré ou en vertu dun droit acquis. Vendre à cette classe les marchandises au-dessus de leur valeur, cest recouvrer en partie de largent dont on avait fait son deuil 16. Les villes de lAsie Mineure, par exemple, payaient chaque année, à lancienne Rome, leurs tributs en espèces. Avec cet argent, Rome leur achetait des marchandises et les payait trop cher. Les Asiatiques écorchaient les Romains, et reprenaient ainsi par la voie du commerce une partie du tribut extorqué par leurs conquérants. Mais, en fin de compte, ils nen restaient pas moins les derniers dupés. Leurs marchandises étaient, après comme avant, payées avec leur propre monnaie. Ce nest point là une méthode de senrichir ou de créer une plus-value.
Force nous est donc de rester dans les limites de léchange des marchandises où les vendeurs sont acheteurs, et les acheteurs vendeurs. Notre embarras provient peut-être de ce que, ne tenant aucun compte des caractères individuels des agents de circulation, nous en avons fait des catégories personnifiées. Supposons que léchangiste A soit un fin matois qui mette dedans ses collègues B et C, et que ceux-ci, malgré la meilleure volonté du monde, ne puissent prendre leur revanche. A vend à B du vin dont la valeur est de 40 l. st., et obtient en échange du blé pour une valeur de 50 l. st. Il a donc fait avec de largent plus dargent, et transformé sa marchandise en capital. Examinons la chose de plus près. Avant léchange nous avions pour 40 l. st. de vin dans la main de A, et pour 50 l. st. de blé dans la main de B, une valeur totale de 90 l. st. Après léchange, nous avons encore la même valeur totale. La valeur circulante na pas grossi dun atome ; il ny a de changé que sa distribution entre A et B. Le même changement aurait eu lieu si A avait volé sans phrase à B 10 l. st. Il est évident quaucun changement dans la distribution des valeurs circulantes ne peut augmenter leur somme, pas plus quun Juif naugmente dans un pays la masse des métaux précieux, en vendant pour une guinée un liard de la reine Anne. La classe entière des capitalistes dun pays ne peut pas bénéficier sur elle-même 17.
Quon se tourne et retourne comme on voudra, les choses restent au même point. Echange-t-on des équivalents ? Il ne se produit point de plus-value ; il ne sen produit pas non plus si lon échange des non-équivalents 18. La circulation ou léchange des marchandises ne crée aucune valeur 19.
On comprend maintenant pourquoi, dans notre analyse du capital, ses formes les plus populaires et pour ainsi dire antédiluviennes, le capital commercial et le capital usuraire, seront provisoirement laissées de côté.
La forme AMA, acheter pour vendre plus cher, se révèle le plus distinctement dans le mouvement du capital commercial. Dun autre côté, ce mouvement sexécute tout entier dans lenceinte de la circulation. Mais comme il est impossible dexpliquer par la circulation elle-même la transformation de largent en capital, la formation dune plus-value, le capital commercial paraît impossible dès que léchange se fait entre équivalents 20. Il ne semble pouvoir dériver que du double bénéfice conquis sur les producteurs de marchandises dans leur qualité dacheteurs et de vendeurs, par le commerçant qui sinterpose entre eux comme intermédiaire parasite. Cest dans ce sens que Franklin dit : « La guerre nest que brigandage, le commerce que fraude et duperie 21.»
Ce que nous venons de dire du capital commercial est encore plus vrai du capital usuraire. Quant au premier, les deux extrêmes, cest-à-dire largent jeté sur le marché et largent qui en revient plus ou moins accru, ont du moins pour intermédiaire lachat et la vente, le mouvement même de la circulation. Pour le second, la forme AMA se résume sans moyen terme dans les extrêmes AA, argent qui séchange contre plus dargent, ce qui est en contradiction avec sa nature et inexplicable au point de vue de la circulation des marchandises. Aussi lisons-nous dans Aristote : « La chrématistique est une science double ; dun côté elle se rapporte au commerce, de lautre à léconomie ; sous ce dernier rapport, elle est nécessaire et louable; sous le premier, qui a pour base la circulation, elle est justement blâmable (car elle se fonde non sur la nature des choses, mais sur une duperie réciproque) ; cest pourquoi lusurier est haï à juste titre, parce que largent lui-même devient ici un moyen dacquérir et ne sert pas à lusage pour lequel il avait été inventé. Sa destination était de favoriser léchange des marchandises ; mais lintérêt fait avec de largent plus dargent. De là son nom (TokoV, né, engendré), car les enfants sont semblables aux parents. De toutes les manières dacquérir, cest celle qui est le plus contre nature 22. »
Nous verrons dans la suite de nos recherches que le capital usuraire et le capital commercial sont des formes dérivées, et alors nous expliquerons aussi pourquoi ils se présentent dans lhistoire avant le capital sous sa forme fondamentale, qui détermine lorganisation économique de la société moderne.
Il a été démontré que la somme des valeurs jetée dans la circulation ny peut saugmenter, et que, par conséquent, en dehors delle, il doit se passer quelque chose qui rende possible la formation dune plus-value 23. Mais celle-ci peut-elle naître en dehors de la circulation qui, après tout, est la somme totale des rapports réciproques des producteurs-échangistes ? En dehors delle, léchangiste reste seul avec sa marchandise qui contient un certain quantum de son propre travail mesuré daprès des lois sociales fixes. Ce travail sexprime dans la valeur du produit, comme cette valeur sexprime en monnaie de compte, soit par le prix de 10 l. st. Mais ce travail ne se réalise pas, et dans la valeur du produit et dans un excédent de cette valeur, dans un prix de 10 qui serait en même temps un prix de 11, cest-à-dire une valeur supérieure à elle-même. Le producteur peut bien, par son travail, créer des valeurs, mais non point des valeurs qui saccroissent par leur propre vertu, il peut élever la valeur dune marchandise en ajoutant par un nouveau travail une valeur nouvelle à une valeur présente, en faisant, par exemple, avec du cuir des bottes. La même matière vaut maintenant davantage parce quelle a absorbé plus de travail. Les bottes ont donc plus de valeur que le cuir; mais la valeur du cuir est restée ce quelle était, elle ne sest point ajouté une plus-value pendant la fabrication des bottes. Il paraît donc tout à fait impossible quen dehors de la circulation, sans entrer en contact avec dautres échangistes, le producteur-échangiste puisse faire valoir la valeur, ou lui communiquer la propriété dengendrer une plus-value. Mais sans cela, pas de transformation de son argent ou de sa marchandise en capital.
Nous sommes ainsi arrivés à un double résultat.
La transformation de largent en capital doit être expliquée en prenant pour base les lois immanentes de la circulation des marchandises, de telle sorte que léchange déquivalents serve de point de départ 24. Notre possesseur dargent, qui nest encore capitaliste quà létat de chrysalide, doit dabord acheter des marchandises à leur juste valeur, puis les vendre ce quelles valent, et cependant, à latin, retirer plus de valeur quil en avait avancé. La métamorphose de lhomme aux écus en capitaliste doit se passer dans la sphère de la circulation et en même temps doit ne point sy passer. Telles sont les conditions du problème. Hic Rhodus, hic salta !
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